01 juin 2012

Franz

Avec Franz, on avait déjà descendu une demi-douzaine de bouteilles de vin de l'intérieur des terres. On les avait flinguées en tirant sec sur les goulots. Au moment de l'addition, on avait essayé de fourrer notre langue dans la bouche de la patronne qui nous avait cuisiné un kilo d'escalopes de veau. Mais Franz était tombé sur moi et ensuite je me suis affalé sur le bois du sol. Et on est resté là. A rire par rasades. Ensuite on a fini par se lever car on avait besoin de sortir la chauve au col roulé pour humidifier la nuit et désodoriser le soir rempli de talons de multiples tailles qui claquaient sur le bitume. Pendant qu'on tirait sur nos braguettes en les prenant pour des trombones à coulisse, Franz aperçut de la lumière au fond d'une échoppe. On n'a pas eu besoin de se regarder sous les réverbères pour décider de s'y glisser. C'était une sacrée trappe à dégénérés. On s'est mis à parler italien et anglais. On toisait sec. On avait beau ne pas bouger et ne pas faire de bruit, on n'entendait rien bouger dans les culottes des bonshommes. Pourtant, deux jumelles jouaient les dresseuses de serpents. A croire que nous étions les seuls, Franz et moi, qui parlions au nom de l'empire des rampants. Et du côté des bois morts, au fond, ça s'est vite remarqué. Tout le monde voulait qu'on montre nos espèces tropicales. Mais nous, on voulait pas trop, les jumelles avait de grosses mains et avec le vin de l'intérieur des terres qui nous grimpait au cerveau comme un crotale, elles nous paraissaient géantes. Alors on a préféré se tirer. Dehors, la lune écrasait les nuages de lumière. On avait encore du temps avant l'aube.